Sandrine Gruda témoigne sur l'endométriose, maladie dont elle est atteinte
À la rencontre des sportives

Sandrine Gruda, sensibiliser et informer autour de l’endométriose

Claire Smagghe
11.10.2022

Sandrine Gruda, internationale de basket-ball, veut sensibiliser au sujet de l’endométriose dont elle est atteinte. Cette maladie touche environ 10 % des femmes en âge de procréer1Source issue du site du minisère de la Santé et des Solidarités., mais reste pourtant très mal connue. Elle se traduit par des règles douloureuses ou encore des douleurs pelviennes. Entretien avec la joueuse de l’ASVEL.

Sandrine Gruda est la porte-parole de l’endométriose dans le monde du sport. Une maladie qu’elle a appris à dompter et qui ne l’a jamais empêché de s’épanouir pleinement sur les parquets. 

Les Sportives : Vous menez plusieurs combats en dehors des parquets et notamment celui concernant l’endométriose, dont vous souffrez, en informant et en sensibilisant. Comment avez-vous su que vous étiez atteinte de cette maladie ?

Sandrine Gruda : J’ai su que j’étais atteinte d’endométriose grâce à une visite chez un gynécologue étasunien. Je savais que lui est un expert dans son domaine, une pointe en gynécologie. Je suis tombée entre de bonnes mains. Les États-Unis sont beaucoup plus avancés que la France sur l’endométriose. J’avais 26 ans quand le diagnostic est tombé. C’est tardif et en même temps certaines femmes l’apprennent à 40 ans. En tout cas, dans ma communauté, 26 ans, ce n’est pas tard. Il faut savoir que la ménopause ne guérit pas de l’endométriose. 

Comment avez-vous appris à gérer l’endométriose dans votre vie de tous les jours et avec le basket-ball ?

Pour moi, les premiers signes d’apparition de règles douloureuses, c’était à 18 ans. Je joue pour Valenciennes. Je prends ce que les femmes prennent habituellement. Un petit comprimé de Spasfon et autre. Ca m’aide, j’arrive à gérer, mais tous les mois c’est le même topo. Plus tard, juste avant que je parte en Russie à vingt ans, on me met sous pilule pour assurer le truc. Et la pilule a pour avantage de camoufler la douleur, mais bien sur ne la guérit pas. Donc, je prends la pilule en continu, et c’est ce qui me permet de vivre avec. Et à 26 ans, le diagnostique tombe et je change de pilule pour une autre à base de progestérone. Cela fonctionne plutôt bien mais je n’ai qu’une seule idée en tête, c’est de retourner voir ma gynécologue française pour lui dire qu’elle est passée à côté d’un diagnostique important. Alors, je vais la voir. 

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L’endométriose a ainsi été confirmée ?

Oui, elle confirme en faisant une IRM, une échographie et toute une batterie de tests. On confirme le diagnostic étasunien : je suis bien atteinte d’endométriose. Il faut quand même bien penser que la première fois qu’on me dit ce mot c’est en anglais. Je parlais anglais mais tout ce qui est du vocabulaire médical, j’étais pas du tout douée. Mais surtout je me demande ce que c’est. C’était vraiment particulier comme moment, car je n’étais pas entourée de ma famille donc je n’avais pas de soutien moral sur le moment.

Comment soulagez-vous ces douleurs ?

Grâce à un régime anti-inflammatoire, sans gluten, sans lactose que j’ai pu pratiquer grâce à des recherches personnelles qui m’ont menées vers une naturopathe. Elle m’a accompagnée sur mes débuts de prise en charge. La médecine conventionnelle n’avait rien de prévu à l’époque et je voulais me soigner, arrêter la pilule. Il a fallu que je cherche une solution alternative. 

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Ce régime spécifique est-il suffisant pour vivre avec l’endométriose ? 

Il faut savoir qu’il y a autant d’endométrioses que de femmes qui ont la maladie. Cela peut me soulager mais ne pas soulager une autre femme. Ce n’est pas la solution pour traiter l’endométriose mais c’est la solution qui a permis à Sandrine Gruda [rires] de soulager ses maux de l’endométriose.

« Avec cette maladie, on est constamment dans l’adaptabilité. »

Comment avez-vous géré l’endométriose au prisme de votre carrière de sportive ?

Le traitement est plus que compatible, car il est anti-inflammatoire. La pratique du sport de haut-niveau est une pratique inflammatoire. Donc en fait, avoir un régime anti-inflammatoire aide non seulement l’endométriose mais aussi mon corps dans le sport de haut niveau. Par rapport à la pratique, aujourd’hui, ça n’impacte pas. Cela ne veut pas dire que demain cela n’impactera pas mais plutôt que jusqu’ici, cela n’a pas impacté. La maladie et ses symptômes peuvent évoluer. Je peux suivre le même traitement, et que mon corps dise tout d’un coup que ce n’est plus suffisant. Avec cette maladie, on est constamment dans l’adaptabilité. 

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Quel conseil donneriez-vous aux personnes qui suspecteraient cette maladie ?

D’en parler clairement au gynécologue, de leur dire qu’elle pense être atteinte d’endométriose. Déjà, avoir mal pendant les règles c’est anormal. La douleur est un signe d’alerte. Quand on a mal à la tête, on prend un comprimé pour répondre à l’information. On va soigner ce problème. Lorsqu’on a mal au ventre, pour nous les femmes c’est normal. À aucun moment on se dit que c’est un signe d’alerte et qu’il faut traiter le problème. Sauf que lorsqu’on parle avec les gynécologues, ils disent bien qu’avoir mal est anormal. C’est en fonction du taux de douleur et des conséquences de cette douleur qu’il faut consulter, on peut être alertée. Il y a plein de schémas possibles. On peut penser qu’il y a inflammation et cette inflammation va choquer le corps. Cela peut entrainer des vomissements ou des diarrhées par exemple. Si le corps réagit, c’est que là on s’approche des symptômes de l’endométriose.

Comment se concrétise votre engagement pour informer et sensibiliser à ce sujet ?

Ce que j’ai commencé à faire, c’est déjà d’en parler ouvertement sur mes propres réseaux sociaux. J’ai commencé à faire des interventions à ce sujet, puis je me suis rapprochée de l’association Info endométriose, je réponds à différentes sollicitations dans les médias. J’ai également participé à la campagne de sensibilisation d’Emmanuel Macron l’année dernière pour que cette maladie soit de plus en plus considérée et comprise auprès des instances et du public directement. 

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Au-delà de cet engagement, vous avez créé l’association Jeux et Enjeux. Pouvez-vous en expliquer les objectifs ?

Jeux et Enjeux est une association que j’ai créée il y a deux ans. J’ai toujours voulu m’investir auprès de la jeunesse martiniquaise. Je cogitais. C’est une réflexion que je menais depuis de nombreuses années. On a mené une première action, un stage que j’ai nommé Jeunes en devenir. Ce stage a plusieurs objectifs : accompagner les jeunes à se réaliser en proposant une pédagogie complémentaire à l’enseignement scolaire et parental. Tous les ateliers proposés ne sont pas pratiqués à l’école, et viennent compléter l’éducation donnée par les parents. La cible c’est les jeunes, de 13 à 17 ans : des étudiants qui prévoient de partir au Canada, aux États-Unis, en Europe pour étudier et mieux vivre le déracinement culturel, émotionnel et social. C’est aussi le sportif de 14 ans qui se voit rentrer dans un centre de formation. L’idée c’est de trouver un alignement tête, cœur et corps. Un autre objectif c’est de lutter contre le décrochage scolaire. C’est quelque chose de déconcertant dans les outre-mer. C’est un phénomène ravageur.

Crédit photo : ©Fédération française de basket-ball

Notes

Claire Smagghe
11.10.2022

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