Les représentations télévisuelles des basketteuses ont-elles évolué ?

Voit-on davantage les championnes du ballon rond sur le petit écran ? Sont-elles valorisées et correctement représentées ? Ce sont les questions que Natacha Lapeyroux, chercheuse à l’Université Libre de Bruxelles, s’est posées dans sa dernière étude intitulée Représentations télévisuelles des basketteuses lors des championnats du monde et des Jeux olympiques : une incarnation de la nation contextuelle et ambivalente. Elle y analyse les représentations des basketteuses à la télévision française et leur évolution sur une période de dix ans. Entretien.

Les Sportives : Votre dernier travail porte sur l’évolution de la médiatisation des basketteuses françaises au cours de ces dernières années. Pouvez-vous nous parler du cadre de cette étude..

Natacha Lapeyroux : C’est une recherche que j’ai pu faire sur un scope de 2005 à 2015, en analysant sur cette période les championnats du monde et les JO. J’ai étudié à la fois les images et les commentaires sportifs avec l’idée de voir à quel moment les basketteuses sont trivialisées ou pas, et à quel moment il y a la reconnaissance de leur statut de sportives de haut-niveau.

Ce qui est ressorti aussi c’était de savoir à quel moment ces sportives incarnent la nation dans un sport de référence et attitré aux hommes. Elles avaient été très performantes durant les championnats du monde de 2010 et les Jeux olympiques de 2012 et cela avait été souligné. Il y a ce moment où on les a vraiment décrites comme incarnant la nation. On les voit portant le drapeau, avec des tresses bleu blanc rouge. Alors que, quelques années auparavant, durant la Coupe du monde 2006, l’équipe de France de basket-ball s’étant qualifiée en quart de finale face à l’Australie, une des meilleures équipes au monde de l’époque. A ce moment là, on le décrivait comme jouant sans pression alors que personne n’aborde ce genre de compétition sans pression.

Pour que les commentateurs sportifs et le grand public les considèrent comme sportives de haut niveau et qu’il y ait de meilleures représentations télévisuelles des basketteuses, il faut donc qu’elles gagnent ?

Il ne faut pas juste qu’elles gagnent, il faut qu’elles fassent des exploits. Pour qu’elles incarnent la nation, il faut que ce soit des performances exceptionnelles. Les hommes incarnent la nation de facto, c’est le sport qu’on a toujours diffusé à la télé (en référence au sport masculin, NDLR). Les femmes elles, doivent faire des choses historiques pour que ce soit le cas.

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De manière plus précise, vous avez identifié trois périodes différentes dans votre étude, la première allant de 2005 à 2008, la deuxième 2009 à 2012 et enfin, la troisième de 2013 à 2015. Que recouvrent-elles ?

La première période, il y a vraiment une trivialisation, peu de reconnaisse. On ne les prend pas au sérieux avec cette idée qu’elles ne peuvent pas gagner de grandes compétition. Dans la deuxième période, on a une reconnaissance des sportives, une mise en valeur de certaine sportive comme Céline Dumerc, qui est vraiment présentée comme la leadeuse de l’équipe. On n’est pas encore dans la starification mais il y a une mise en avant de certaine sportive qui ne se faisait pas avant. C’est à ce moment ou elle incarnent la nation. Et dans la dernière période, on revient en arrière. Elles ne font pas d’exploits exceptionnels, elles n’incarnent plus la nation et il n’y a plus de valorisation. C’est là qu’on se rend compte que pour le sport des femmes il faut vraiment qu’il y ait des exploits exceptionnels pour qu’il y ait une forme de reconnaissance.

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Dans cette étude, vous insistez notamment sur la tenue des basketteuses et l’amplitude de leurs shorts et tee-shirts qui laissent peu de place aux formes. Quel impact cela a sur leur médiatisation ?

Ce qui est intéressant dans ce que j’ai analysé, mais pas que dans cette étude là, c’est que les sports où les femmes ne sont pas vêtues de manières moulantes contrairement à l’athlétisme ou à la natation, sont arrivés à la télévision dans la première moitié des années 2000. Ca ne fait donc pas si longtemps qu’on voit des femmes en shorts et maillots larges. Quand on joue au basket, on se bouscule, on transpire. Ce sont des mises en scène du corps qui donne à voir de nouvelles façons d’être dans le sport.