À la rencontre des sportives

La science au service de la performance des gymnastes, avec Nicolas Tordi

Mejdaline Mhiri
22.10.2019

Depuis deux ans, la Française des Jeux (FDJ) soutient le sport au féminin via « Performance pour Elles ». L’idée est d’accompagner financièrement des fédérations sportives françaises ayant un projet de performance au féminin à horizon 2024. En 2019, cinq fédérations ont été soutenues : FFGym, FFAthlétisme, FFTriathlon, FFSurf et FFVoile. Nicolas Tordi, expert scientifique pour la Fédération Française de Gymnastique (FF Gym), l’une des fédérations lauréates, nous détaille le projet de performance autour des athlètes féminines. L’objectif principal est de réaliser  des recherches pour optimiser les processus d’entraînement et ainsi permettre aux athlètes de se  préparer au mieux pour le rendez-vous olympique de Paris en 2024.

En quoi consiste le projet « Performance pour Elles » décliné par la Fédération Française de Gymnastique ?

Nicolas Tordi : La gymnastique artistique et rythmique féminine est un sport à maturité précoce. La charge et le volume de travail sont très importants. Généralement, les athlètes s’entraînent entre 25 et 30 heures par semaine. A cela s’ajoutent les charges scolaires, ou universitaires, puisqu’elles ont entre 12 et 20 ans. Dans un contexte où la concurrence est de plus en plus rude, la FFGym a engagé une dynamique de recherche pour améliorer les processus d’entraînement. Ce travail est mené sur les différents états d’une athlète dans une optique de performance sur une saison entière. Cette étude sera ensuite vulgarisée puis partagée auprès des entraîneurs pour les sensibiliser à diverses problématiques.

 

Nicolas Tordi

Nicolas Tordi Copyright : Ludovic Godard – Université Franche-Comté

Auprès de combien d’athlètes travaillez-vous pour mener cette étude ?

Notre recherche porte sur un groupe d’une vingtaine d’athlètes. Elles sont à l’INSEP ou à Marseille où l’on travaille en lien avec Technosport[1]. Via des questionnaires, nous  évaluons leur état de forme. En les suivant toute la saison, nous  aurons une vision globale sur chacune d’entre elles.. Nous testons différents outils pour voir comment ils sont perçus par les athlètes.

 

L’idée est-elle de réduire le temps d’entraînement en le rendant plus qualitatif ?

Non, car ce temps d’entraînement est nécessaire. Mais il ne faut pas l’augmenter non plus. On ne peut pas raisonnablement tirer jusqu’à 45 heures par semaine. Nous sommes vigilants aux questions de santé des athlètes, au projet d’étude, à l’épanouissement personnel, à la reconversion. Nous voulons plutôt optimiser le temps d’entraînement.

 

Sur quels aspects portent les recherches que vous menez ?

Nous essayons  d’appréhender la charge globale, physique et mentale, que vivent nos gymnastes. Nous  voulons  prendre en compte tout ce qui va peser sur l’athlète, comme le stress de la préparation de la compétition ou d’un examen.Nous devons identifier les bons indicateurs pour prendre les bonnes décisions. D’autant que nous ne traitons  pas toutes les athlètes de la même manière. Pour parvenir au plus haut niveau international entre 16 et 20 ans, il faut débuter entre 6 et 8 ans. Entre-temps, il faut avoir respecté la croissance de la jeune fille et toutes les charges qui pèsent sur elle.

 

Comment travaillez-vous sur cette charge globale ?

Il y a un premier travail de mise en réseau et de partage des informations internes au staff et à l’entourage de chaque athlète que sont les kinés, les médecins, les parents etc. Nous souhaitons avoir une vision la plus fiable possible, alors nous croisons les informations. Nous repérons  ce qui est aigu de ce qui est chronique. Nous analysons différentes phases : les périodes de compétition intense et les retours à des moments plus classiques. L’idée est d’avoir une représentation au fil de la saison et comprendre à quoi ressemble une semaine type.

 

Les échanges avec les athlètes sont-ils nombreux ?

Des entretiens sont prévus avec les athlètes mais nous veillons à ne pas les sur solliciter. Il ne s’agit pas de les interviewer chaque matin sur leur état de forme, cela pourrait  les perturber. Nous nous positionnons plus comme observateur lors des entraînements. Parfois, nous avons des surprises avec une gymnaste qui nous dit être fatiguée alors que l’entraînement s’est très bien déroulé. Cela s’explique par le fait que si elle sait que son état de forme n’est pas optimal, sa vigilance psychologique est accrue, notamment pour éviter une blessure, et elle est plus réceptive  aux conseils de son coach.



[1]Technosport est un gymnase expérimental dédié à l’enseignement et à la recherche sur le campus de Luminy, à Marseille.

 

* Traduction FR : by = par

 

Dans le cadre de son programme d’actions Sport Pour Elles, FDJ soutient et encourage
les championnes, et agit pour donner envie à toutes les femmes de pratiquer une activité sportive
« j’aimerais changer les mentalités
et faire évoluer les mentalités. Et cela passe aussi par les encadrants.
#SportPourEllesFDJ
Mejdaline Mhiri
22.10.2019

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