À la rencontre des sportives

Iris Elbazis, une entrepreneuse aux prémices de l’esport

Julie Langlois
27.09.2023

Iris Elbazis, présidente et fondatrice de WSC Group, est une passionnée de jeux vidéo et d’esport. Avec plus de sept ans d’expérience dans l’industrie, elle a suivi son intuition et sa vision pour créer son propre groupe média, qui est aujourd’hui le deuxième site français sur l’actualité des jeux vidéo.

À 35 ans, Iris Elbazis est la présidente et fondatrice de WSC Group. Depuis sept ans, elle évolue dans le secteur de l’esport, avec un passage chez Webedia et Eclypsia auparavant. À ses débuts, elle se lance en tant que journaliste spécialisée sur League of Legends, couvrant des compétitions. Rapidement gagnée par des envies d’ailleurs, l’idée de construire un projet personnel la titille alors que le monde de l’esport est en pleine construction. « Je voulais faire les choses comme je les vois », lance Iris Elbazis.

C’est avec plusieurs expériences accumulées dans le domaine des jeux vidéo qu’elle se lance et crée WSC Group en 2017. Pensée pour être une agence de gaming, WSC Group revêtait aussi une branche agence de talents et une orientation média. Rédacteurs ou chefs éditoriaux, Iris et ses associés ont rapidement vu évoluer leur bébé vers le groupe média.

Des leçons précieuses, Iris en a appris tout au long de ce chemin entrepreneurial. Elle a notamment compris l’importance de faire confiance à sa vision, mais aussi celle de s’entourer et de se faire accompagner. « J’ai beaucoup mûri sur les relations humaines », relate celle qui emploie désormais 35 personnes. 

 

Tu ne peux pas tout gérer, tout savoir… C’est un gros travail sur soi-même. Ce que je retiens c’est que j’ai beaucoup évolué personnellement, accepté mes faiblesses, fait des concessions…

 

Une passion créative et sociale

« J’ai toujours été une très grosse joueuse, même maintenant. Je dois y consacrer au moins 2 heures par jour », lance Iris Elbazis, avant tout passionnée de jeux vidéo et d’esport. Son engouement pour les jeux vidéo a débuté dès son plus jeune âge, lorsqu’elle a commencé à jouer à Conquête 2.0, un MMO en 2D assez simpliste. Par la suite, ses proches lui ont conseillé de se tourner vers World of Warcraft (WoW). Séduite, elle a réussi à concilier sa pratique du jeu avec ses études universitaires, veillant à ne pas s’enfermer dans une pratique excessive.

Cette expérience sur World of Warcraft lui a permis de saisir pleinement la dimension sociale des jeux vidéo. « C‘est une activité de divertissement où l’on se sent actif mentalement et physiquement. » Elle y voit un parallèle entre certains jeux vidéo et les exercices physiques, faisant même référence à sa passion pour le piano : « Il y a des jeux qui demandent des routines physiques similaires au piano. Personnellement, en tant que pianiste, je vois des similitudes entre les gammes pianistiques et les mécaniques des jeux vidéo. »

Bien qu’elle ait moins de temps pour jouer actuellement, elle continue d’acheter les extensions de WoW dès leur sortie. Iris Elbazis a toutefois tendance à s’ennuyer lorsque les jeux ne proposent pas d’aspect compétitif ou d’objectifs à atteindre. Elle préfère désormais les jeux de stratégie tels que Civilization, League of Legends (LoL), Teamfight Tactics (TFT), et les jeux de tir à la première personne (FPS) qui lui offrent un petit moment de compétitivité mais surtout un exutoire.

« L’univers du jeu vidéo est incroyablement propice à la créativité. » Une emprunte artistique que revêt aussi son entreprise et qui a d’ailleurs collaboré avec les Châteaux de la Loire pendant la pandémie de Covid-19. « Les jeunes qui devaient les visiter ne pouvaient plus à cause du Covid, c’était dommage. Alors, nous avons reconstruit les Châteaux de la Loire à l’identique dans le mode créatif de Fortnite. Nous avons également travaillé avec un célèbre YouTuber historique qui faisait le guide en live pour les élèves. »  

Les jeux vidéo étaient et sont toujours une source de rencontre, qui lui ont permis de faire des rencontres inattendues, bien loin de son cercle professionnel ou géographique. « C’est cette espèce de richesse qui me passionne dans les jeux vidéo, et ensuite l’esport est arrivé avec CS, LoL… Je trouvais que c’était un bon mélange entre le sport et la téléréalité. »

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L’esport, une industrie mécomprise

Lorsqu’il s’agit de l’esport, Iris Elbazis rencontre une forme d’incompréhension. C’est notamment le cas pour les Olympics Series selon elle, abordant un décalage entre les jeux proposés et les attentes des joueurs. « Il y a une confusion dans le choix des jeux, avec l’idée de combiner l’esport pour attirer les jeunes, tout en proposant des jeux qui s’adressent à un public historique. Ce compromis intermédiaire ne satisfait ni les joueurs ni les non-joueurs. C’est un entre-deux qui  ne fonctionne pas et constitue un choix à demi-mesure. »

L’esport est-il un sport ? L’opinion de la joueuse est bien tranché et voit dans ceux qui affirmeraient qu’il n’en est pas, une véritable méconnaissance du domaine. Un enfermement dans les préjugés. « Ces idées préconçues sont de moins en moins répandues. Les parents, de plus en plus jeunes, commencent à accepter l’esport comme une activité normale. Le problème réside dans les discours des institutions qui perpétuent cette méconnaissance. »

Iris se souvient d’ailleurs de l’inquiétude de ses parents lorsque, plus jeune, elle passait des journées entières dans sa chambre à jouer. « Mais je ne me contentais pas seulement de jouer », insiste-t-elle. Elle écrivait des articles, échangeait avec des personnes qui sont aujourd’hui ses associés, créait des contenus et acquérait des compétences, notamment en utilisant Photoshop. Elle met en avant l’idée qu’il ne s’agit pas simplement de jouer aux jeux vidéo, mais qu’il y a bien plus à découvrir et à expérimenter.

Etre une femme dans l’univers des jeux vidéo : un défi persistant

Etre une femme dans l’univers des jeux vidéo revêt son lot de défis. Iris Elbazis regrette notamment les remarques désobligeantes dont sont souvent victimes les femmes sur les chat vocaux et constate que la simple présence d’une voix féminine peut être considérée comme une invitation aux comportements irrespectueux. Bien que la situation se soit améliorée, ces problèmes persistent.

Ces comportements, elle les retrouve aussi dans son domaine professionnel, faisant face à une problématique de légitimité, rencontrant des personnes qui ont une vision archaïque des rôles de genre. Elle-même a connu des moments où, en débutant dans les jeux vidéo, sa voix grave faisait penser aux autres joueurs qu’elle était un jeune homme en pleine mue. Elle a profité de cette confusion, ne révélant sa véritable identité qu’au fil du temps et aux personnes qu’elle connaissait.

J’ai agi comme ça directement, parce que dans la vraie vie je sais qu’on se fait emmerder et je pensais que ça serait la même chose en jeu, c’était juste plus simple.

En tant que membre de Women in Games, elle participe à des interventions telles que des tables rondes et des conférences, avec l’objectif de partager son expertise et ses expériences. Mais aussi de contribuer à créer un environnement plus égalitaire et inclusif pour les femmes dans le monde du jeu vidéo.

Julie Langlois
27.09.2023

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