À la rencontre des sportives

Caroline Ciavaldini, la quête personnelle d’une maman grimpeuse

Assia Hamdi
10.11.2023

Athlète et maman de deux enfants, la vice-championne de France d’escalade, Caroline Ciavaldini, 38 ans, raconte dans le documentaire Baby Steps son voyage personnel, avec son compagnon grimpeur, James Pearson, depuis les derniers mois de sa deuxième grossesse jusqu’à son post-partum.

Caroline Ciavaldini n’est pas facile à joindre. Mais une fois qu’on arrive à l’intercepter, la grimpeuse de 38 ans est passionnée… et passionnante. Vice-championne de France d’escalade en 2010, l’athlète est aussi maman d’Arthur, quatre ans, et de Zoéllie, deux ans, deux bambins qu’elle a eus avec le grimpeur britannique James Pearson. Dans le documentaire Baby Steps (sur la chaîne YouTube de The North Face), Caroline et James racontent leur voyage personnel depuis les derniers mois de la deuxième grossesse jusqu’au post-partum. Un documentaire nécessaire parce que devenir parent, quand on est sportif de haut-niveau, n’est pas toujours une sinécure. Éclairant et sans faux-semblants.

« J’ai réussi à faire des voies dures entre mes deux enfants, mais la grossesse a été un sacré trou noir dans ma carrière. En général, on voit les sportives disparaitre, car tous les partenaires ne maintiennent pas leur confiance. C’est aussi nouveau que les femmes osent et rêvent de continuer à être professionnelle. » La grimpeuse a été soutenue par son équipementier The North Face, qui a changé sa politique en apportant un soutien aux athlètes enceintes. « Mais des copines plus âgées ont vu leur carrière arrêtée ou leurs contrats coupés au moment d’enfanter. »

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De la maternité à la parentalité

Le corps qui change, ne plus se sentir capable… le post-partum reste une autre période tourmentante pour le regard que la sportive porte sur son corps. « Deux grossesses, ça défonce l’anatomie. Je m’étais jamais sentie aussi nulle. Il y a aussi les abdos écartés, la grosse prise de poids, les tendons ramollis, on ressemble à un alien. » Difficile dans cette situation de reprendre le contrôle de sa pratique. « Je glissais sur les prises : en fait, je n’arrivais plus à recruter mon gainage car les abdos avaient bougé. J’ai fait de la visualisation pour réactiver tout ça. » Avec deux enfants et deux carrières à gérer, la question du partage des tâches s’est immiscée dans le quotidien de Caroline et James.

Quand il est question de parentalité, le poids de l’héritage culturel ressurgit. « James a grandi avec un papa qui assistait aux matchs de rugby pendant que sa maman s’occupait des enfants. Il a fallu qu’il conscientise cet héritage, ce déséquilibre, pour le changer. Et il a fallu que je me batte. » Par cette mise à plat, Caroline Ciavaldini s’est de nouveau autorisée à rejeter l’exemple de « sa » maman qui s’est sacrifiée pour ses enfants et à redevenir Caroline la grimpeuse. « Dès que je m’entraîne, je ressens encore de la culpabilité et encore plus que James. Mais c’est légitime pour moi, de pratiquer. C’est ma personnalité, ça me rend heureuse et donc, ça rendra mes enfants plus heureux. »

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Retrouver les sommets

Devenir mère, pour Caroline Ciavaldini, c’est aussi devenir plus alerte sur les problématiques d’environnement et de mobilité. « On veut vivre à la montagne pour nos enfants. » Puisque partir ensemble et loin devient ardu, le couple organise sa vie dans le sud-est de la France. Six mois dans le Gard, puis six mois dans une vieille grange, près de Briançon, que le couple retape aujourd’hui. « On a restreint les vols, sauf quand les sponsors le demandent et qu’il n’y a pas d’autre possibilité. » C’est cette évolution qui lui a fait choisir son dernier projet d’ascension, à quatre heures de la maison. « C’est assez pratique, d’autant que les enfants vont maintenant à l’école. »

Destination « Le Voyage », une voie de 38 mètres de cotation 7a, dans l’arrière-pays niçois, à Annot, que James Pearson a été le premier à ouvrir, en 2017. « Avant ma première maternité, j’y étais allée en moulinette (technique qui permet au grimpeur d’être assuré par une personne placée au pied de la voie d’escalade, NDLR), pour tenter mes mouvements. Je me disais que je ne pourrais pas la réaliser. » Et finalement, après être devenue maman, Caroline Ciavaldini réalise qu’elle en est peut-être capable… Ce que la grimpeuse entrevoit, c’est qu’être parent force à la patience… et à l’indulgence. « Je m’autorise à ne jamais réussir mon projet. Parce que je m’autorise à être plus compatissante envers moi-même. »

Assia Hamdi
10.11.2023

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