Récit

Tir : Un « sport de machos », pour Carole Cormenier, où la mixité gagne du terrain

Xavier Regnier
25.11.2021

Au rayon des sports catalogués « masculins », le tir figure dans le haut du panier. Après une stricte séparation entre les hommes et les femmes depuis 1992, deux épreuves mixtes ont fait leur apparition à Tokyo. Mais pour Carole Cormenier, les mentalités doivent encore changer.

28 juillet 1992, Jeux olympiques de Barcelone. Seule femme en finale du skeet, la Chinoise Zhang Shan rate deux plateaux. Mais aucun homme ne pouvant la rattraper après son score parfait des qualifications, elle signe un record olympique en plus de rafler la médaille d’or. Quatre ans plus tard, à Atlanta, elle ne pourra pas défendre son titre : l’Union internationale de tir, avec l’appui du Comité international olympique, a mis fin à la mixité et n’a pas prévu d’épreuve féminine.

 

« Ils ont décidé que ce n’était pas normal », raconte Carole Cormenier, encore au jardin d’enfants à l’époque. La Française de 31 ans, médaillée de bronze aux championnats d’Europe de tir en 2021, fait encore le constat d’un « sport de machos ». Avec son caractère, la Limougeaude y a pourtant fait sa place : « après huit ans de foot, je savais déjà ce qu’était un monde d’hommes ». C’est d’ailleurs son père, tentant de faire le deuil de son épouse, qui l’amène sur les pas de tir. Carole Cormenier refuse plusieurs fois de tirer, avant de s’y essayer et d’apprécier.

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« En France, les regards n’ont pas changé »

Les compétitions féminines existant désormais en parallèle de celles des hommes, la jeune femme peut compter sur des modèles féminins pour se forger une ambition. Notamment avec Delphine Réau-Racinet, médaillée d’argent à Sydney pour la première épreuve de fosse olympique féminine, puis en bronze à Londres. « J’ai fait des compétitions avec elle, on est devenues super copines. » L’aînée encourage Carole Cormenier à viser plus haut, et à regarder ce qui se passe à l’étranger : à Londres, c’est Jessica Rossi, une Italienne de 21 ans, qui remporte l’or olympique.

 

La situation du tir français aide encore plus les féminines à se décomplexer. « Depuis quelques années, on fait mieux que les hommes » en termes de résultats, pointe celle qui a remporté l’épreuve de fosse olympique de la coupe du monde à Al-Aïn en 2019. Pourtant, « les regards n’ont pas changé en France. Ils sont contents de nous trouver maintenant qu’il y a le mixte », mais à leurs yeux « ce n’est pas normal qu’une femme parte en compétition pendant que le mari reste à la maison », regrette-t-elle.

Car après des années de séparation sans évolution, où les femmes ne tiraient que 75 plateaux au lieu de 125, la fédération internationale a créé une compétition par équipe mixte en 2017, au lendemain des Jeux de Rio. « Sans explication », Carole Cormenier émet l’hypothèse d’un changement qui s’inscrit dans un effort « du monde du sport en général » en matière de mixité. Avec son coéquipier Antonin Desert, elle a remporté la médaille d’argent aux championnats d’Europe 2019, avant d’aller seule à Tokyo, où elle n’a eu « aucune remarque ».

Propos recueillis par Xavier Regnier

Crédit photo : FFTIR/F.Chales

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Xavier Regnier
25.11.2021

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