À la rencontre des sportives

Prithika Pavade : « Je veux marquer mon sport »

Emma Forton & Killian Tanguy
06.06.2023

Jeune pongiste de 18 ans, Prithika Pavade a conquis tous les titres dans les catégories jeunes. Après un round d’observation à Tokyo, elle se prépare maintenant aux Jeux de Paris. Un parcours atypique à découvrir.

C’est depuis sa chambre que la jeune Prithika Pavade est revenue sur sa carrière, déjà bien remplie. Réservée mais pleine d’énergie, elle naît à Villepinte en Seine-Saint-Denis, en août 2004, un an après l’arrivée de ses parents venant de Pondichéry en Inde, où son père investit le tennis de table à un bon niveau. Une inspiration pour la jeune fille, aux côtés d’un père exigeant mais à l’écoute. « J’ai testé la discipline, j’y allais de plus en plus et j’ai rapidement accroché », se souvient-elle. C’est d’ailleurs le seul sport qu’elle a pratiqué, dès 6 ans, au Club bourgetin tennis de table avant de rejoindre le Saint-Denis Union Sports (SDUS).

Une passion qu’elle partage avec l’ensemble de sa famille qui l’a « toujours suivi et soutenu dans les bons et mauvais moments ». Son grand frère et sa petite sœur l’ont aussi pratiqué. Sa mère, qui est « moins dans le sport », s’y est intéressée avec le temps. « Elle connaît toutes les joueuses et suit tous les résultats », assure-t-elle. « De vrais piliers » dans sa vie. Dès qu’il n’y a pas de compétition, elle essaye de les retrouver.

À 9 ans, la pongiste remporte ses premiers titres de championne de France benjamine (M11) et minime (M13). Le sport fait donc déjà partie intégrante de sa vie et à seulement 11 ans, elle intègre le pôle espoir avec deux entraînements par jour. « Même si c’était difficile avec l’école, tout faisait sens. »

Prithika Pavade, de nombreux atouts

Benjamins, minimes, cadettes, juniors, en simple ou en double… Prithika Pavade a raflé tous les titres de championne de France et s’est même démarquée à l’internationale. Un début de carrière « positif et performant ». Son avantage : être gauchère. « Quand je joue contre une droitière, j’arrive à cibler des zones embêtantes. Face à une gauchère, je suis moins à l’aise. » Ses adversaires aussi donc.

Assumant ne pas avoir « un gabarit hyper puissant », elle s’appuie surtout sur ses qualités mentales : « Je suis connue pour être maline et assez bonne tactiquement. » « Illisible dans ses réactions et ses émotions », il est difficile de lire son jeu. « J’essaie de mettre le plus possible mon adversaire dans l’incertitude », confie-t-elle. « Vitesse d’adaptation », « intensité » et « prise de risques » sont ses mots d’ordre. Alors même s’il y a du stress, elle « le transforme en énergie positive » car elle « adore la compétition et être meilleure ». La pongiste préfère les simples aux doubles mais elle l’affirme : « Je me donne toujours à 100 % parce que je peux apporter dans tous les modes de jeu. »

Autre particularité, la pongiste loge à l’INSEP (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) et s’y entraîne jusqu’à 25 heures par semaine, musculation comprise. Elle est accompagnée de plusieurs entraîneurs, Aurélien Puel et son coach national, Ludovic Rémy. « Ils essaient de combiner leurs qualités pour me préparer au mieux », déclare-t-elle.

Ces échelons, elle a pu les gravir grâce à l’aide de son premier entraîneur, Nicolas Greiner, décédé en 2021. « ll m’a suivi depuis que j’ai voulu me lancer dans le ping et nous avons fait un bon bout de chemin ensemble », se remémore-t-elle, nostalgique. Du Pôle espoir jusqu’à l’INSEP, il était son entraîneur référent :« J’ai mis du temps à le digérer, un vrai choc. Mais, jamais je n’ai pensé à arrêter le tennis de table. »

En 2021, elle passe en seniors (plus de 19 ans) alors qu’elle n’est que junior. Un nouveau challenge « plus dur, avec moins de victoires et plus de défaites ». Mais elle reste optimiste : « C’est un petit gap à passer. Je suis fixée sur mon objectif : gagner des matchs chez les adultes. »

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Ordinaire mais olympienne

Concilier études et quotidien de sportive de haut niveau représente un autre défi pour Prithika Pavade. Depuis septembre 2022, la pongiste effectue une licence en biologie. Même si elle priorise le tennis de table, elle est « rigoureuse dans les études » car elle souhaite avoir, à la fin de sa carrière, une porte de sortie. Grâce à son statut de sportive de haut-niveau, elle peut aménager son emploi du temps et bénéficier de cours particuliers. D’autant plus que « ces années sont primordiales » pour sa progression.

« Je veux marquer mon sport. »

Dans son emploi du temps chargé, elle trouve des moments pour d’autres « envies et passions », notamment des séries comme Friends. Dans ses oreilles, « un peu de tout », même si elle préfère la « pop US ». Et dans sa bibliothèque, des livres de science-fiction : « J‘ai lu Harry Potter, Hunger Games. » Au-delà de la pongiste, une adolescente « assez normale ». Parce qu’à cet âge-là, elles sont peu nombreuses à avoir déjà participé à des Jeux olympiques. « Une incroyable expérience », malgré un public absent dû aux restrictions sanitaires. En plus, la jeune sportive n’était pas initialement prévue.

« Être la meilleure européenne »

Mais en 2024, pas de surprise de dernière minute pour celle qui est issue du groupe Génération Paris 2024. « À l’approche des Jeux, je vais mettre mes études en retrait. La préparation commence maintenant, je fais plus de volume pour le ping et je travaille sur mes axes de progression. »

« Très ambitieuse » et souhaitant aller « le plus loin possible », elle compte attendre les mois précédant les Jeux pour fixer son objectif final. « Pour l’instant, parler de médaille c’est trop tôt », surtout dans un sport dominé par les pays asiatiques. « En 2022, en seniors, j’ai perdu 50 % de mes matchs face à des Chinoises. Mes bêtes noires. » Pour les battre, elle compte bien bénéficier du support du public français. « C’est magique de pouvoir disputer la plus grande compétition internationale dans son pays. »

En tout cas, les Jeux, elle en a déjà des étoiles plein les yeux. « La dernière fois, c’était il y a 100 ans et là ils reviennent pile dans ma génération. C’est une chance en or, je vais en profiter au maximum. » À plus long terme, sa grande ambition : « Être la meilleure européenne. »

Photo : Fédération française de tennis de table

Emma Forton & Killian Tanguy
06.06.2023

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