À la rencontre des sportives

Mathieu Istil, du cyclisme au militantisme

Claire Smagghe
02.08.2020

Mathieu Istil est coordinateur sportif au COCCF (Club Omnisport de Courcouronnes de Cyclisme Féminin) et s’occupe notamment de l’encadrement technique de la section féminine. A 46 ans, ce passionné de cyclisme a gravi les échelons que tardivement. Fervent combattant des injustices, il est aujourd’hui engagé pour le développement du cyclisme pour les femmes et contribue à l’encadrement de l’aventure « Donnons des Elles au Vélo M-1 » sur les routes de France.

C’est à 20 ans que le briviste d’origine s’adonne sérieusement à la pratique du vélo pour ne plus le quitter.  « J’ai commencé le vélo à 20 ans en tant que coureur cycliste. J’avais l’habitude de regarder le tour de France avec mon grand-père mais je ne m’intéressais au vélo qu’en juillet. Puis un jour des amis m’on proposé d’essayer le VVT. Et finalement, j’ai fait le choix du vélo de route en m’inscrivant au club de l’AS Corbeil Essonne, très connu à l’époque ». Dans le mythique club de Sean Kelly, Mathieu a posé la première pierre d’un long chemin dans son aventure à deux roues.

ENTRE PHYSIQUE CHIMIE ET CYCLISME, IL N’Y A QU’UN PAS !

Alors qu’il est étudiant en physique chimie, Mathieu décide de s’investir pleinement dans sa nouvelle passion et s’offre les services d’un entraineur privé. « A l’époque c’était hyper rare de prendre un entraineur privé. Il a réussi a transformer mon petit talent. Je suis passé du niveau régional au niveau national. C’était une belle progression, cela m’a ouvert les yeux sur l’entrainement et la capacité du corps à se transformer. Cela m’a passionné. Au fur et à mesure, j’ai fait des recherches sur l’entrainement, les sciences de l’entrainement. Tout cela, en même temps que mes études en science physique pour devenir prof ». En 2003, lassé de la pratique du cyclisme, Mathieu s’oriente vers la photographie et notamment dans le domaine du cyclisme professionnel.

VERS UN ENGAGEMENT MILITANT

Au cours de ses activités, il rencontre Magali Le Floc’h, double championne de France sur route en 2002 et 2005. La cycliste professionnelle va alors ouvrir la voie d’un engagement nouveau. « Quand j’étais photographe, j’ai aidé une équipe de cyclisme féminin en tant que photographe pour faire leur communication. Dans cette équipe il y avait Magalie Lefloc’h, coureuse pour la T mobile. Je voyais bien qu’il n’y avait pas de budget pour les filles. Nous avons eu une discussion sur son salaire. Elle m’a avoué gagner 5000 euros par an. Et alors là, j’ai senti l’injustice. J’y ai été très sensible », raconte l’actuel entraineur du COCCF.

Il y a 10 ans, Mathieu rencontre Claire avec qui il partage sa vie. Il lui transmet sa passion pour le vélo et s’aventurent ensemble dans de nouveaux projets en faveur du développement de la pratique du cyclisme pour les femmes. « On est allés voir un club près de chez nous. Quand on a voulu développer des choses : tenues pour les filles, préparation physique et mental, on a rapidement senti un sexisme subjacent. Ce n’était pas la priorité. On a décidé partir et on a cherché une ville qui voulait nous accueillir. On a trouvé la ville de Courcouronnes. Le maire nous a proposé de devenir une section du club omnisport ». Né alors, le COCCF, acteur incontournable dans le paysage du cyclisme féminin français.

DONNER DES ELLES AU VÉLO

Pour donner un élan à leurs idées, le duo se lance dans une aventure humaine haute en couleurs. Mathieu se forme et entame une reconversion vers l’entrainement. Aujourd’hui, il coordonne l’ensemble des activités de la section et assure l’encadrement de la partie purement technique. « A ce jour, il y a 40 adhérentes. J’utilise une méthode pédagogique participative. Elle m’empêche de tomber dans le schéma classique de l’homme qui sait. Je travaille beaucoup comme ça. Pour préparer une compétition par exemple, je donne les informations nécessaires et je les laisse échanger pour finaliser la préparation de la compétition. Cela m’évite de tomber dans nos travers d’homme et ça fonctionne bien avec les filles. Sur certaine phase d’entrainement, je fais plusieurs propositions et elles choisissent. Je garde toujours cette phrase en tête : on fait toujours mieux ce qu’on veut que ce que l’on doit. Parfois j’impose aussi, il faut trouver l’équilibre. L’idée ce n’est pas de les rendre dépendantes. J’utilise cette méthode aussi dans mon second métier de professeur de physique », précise le coach.

Lancé sur les routes de l’Hexagone aux cotés des 13 ambassadrices, Mathieu revêt pendant ces 3 semaines toutes les casquettes : coach, coordinateur mais aussi cycliste. Preuve que l’engagement conjugué au féminin peut aussi se faire en mixité !

 

Photos copyright : Marie Istil

Claire Smagghe
02.08.2020

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