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Escrime : à Orléans, la Bauer Academy prône la mixité

Les Sportives Centre-Val de Loire
07.02.2024

A Orléans, la Bauer Academy a pour particularité de proposer un entraînement en mixité pour les sabreurs de haut niveau. La société a été créée par Christian Bauer, entraîneur de renommée internationale. Après s’être lancé à Charenton, en région parisienne, c’est dans le Loiret qu’il s’est installé. De nombreux champions, désireux de travailler avec lui, l’ont suivi. Parmi eux, le couple loirétain d’adoption, Manon Apithy-Brunet et Bolade Apithy.

En décembre dernier, le club Insep Alumni a mis Christian Bauer à l’honneur. L’entraîneur de sabre a été récompensé pour l’ensemble de sa carrière. Il faut dire que le palmarès est éloquent : plus de 180 médailles, dont 12 olympiques et 53 mondiales. Ces chiffres sont en constante évolution puisque l’aventure continue. Christian Bauer a officié dans de nombreux pays : France, Italie, Chine, Russie.

C’est d’ailleurs en revenant de Russie, un peu contraint et forcé, qu’il a décidé de se poser un peu. Après une vingtaine d’années sur les routes, il se réinstalle donc en France en 2019. Dès son retour, de nombreux athlètes le sollicitent pour des entraînements individuels. L’idée de monter sa propre structure commence alors à germer dans sa tête.

 

De la région parisienne à Orléans

« Je suis allé voir Daniel Levavasseur qui avait monté son académie d’épée à St Maur. Je lui ai demandé comment ça marchait. J’ai travaillé un peu chez lui avant de m’installer à Charenton. Très vite, beaucoup de personnes se sont déplacées pour travailler avec moi. »

Sabreuses et sabreurs, de France et d’ailleurs, viennent spontanément vers lui. En 2021,  la Bauer Academy prend ses quartiers à Orléans. « J’ai été approché par les adjoints au sport de la ville, Thomas Renault et Romain Lonlas. Ils voulaient qu’un maximum d’athlètes licenciés à Orléans puissent participer aux Jeux de Paris 2024. Sur l’ensemble des athlètes que j’entraîne, beaucoup peuvent prétendre y aller. »

Tous sont venus grossir les rangs du Cercle d’Escrime Orléanais, même s’ils s’entraînent indépendamment. Christian Bauer a créé sa propre société et loue la salle Christian d’Oriola tous les jours, de 8h à 15h. Le noyau dur de la Bauer Academy, c’est une grosse quinzaine d’athlètes et presque autant de nationalités. Autour de ces « permanents », des stagiaires viennent ponctuellement prendre la leçon, soit en individuel, soit par équipes.

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Mixité : l’exemple étranger

La mixité à l’entraînement est l’une des spécificités de la Bauer Academy. C’est par ses expériences à l’étranger que l’entraîneur a fait ce choix : «Quand j’étais en France, je ne m’occupais que des garçons et puis quand je suis allé en Italie, j’ai vu des filles et des garçons tirer ensemble. Au début, j’ai été choqué, je me suis dit mais où est-ce que je suis là ? »

Christian Bauer donne la leçon aux meilleurs sabreurs mondiaux. Photo : Ch. Chapiotin

Certes un peu surpris de cette façon de faire, il l’a finalement très vite adoptée : « Je me suis rapidement rendu compte que de faire travailler garçons et filles ensemble atténuait un peu les états d’âme. C’est à dire que les filles qui sont un peu sensibles se font bousculer par les garçons. Eux de leur côté sont obligés de se calmer un peu, donc ça fait un super équilibre sur le comportement et aussi au niveau de travail. »

Sa démonstration est simple et logique : « Les filles peuvent évoluer à un niveau plus élevé, en survitesse. Même si les mouvements ne sont pas complets, elles peuvent travailler sur la vitesse d’exécution. A l’inverse, les garçons sont obligés de ralentir, de pas aller trop vite dans leur mouvement. Ils vont ainsi être plus axés sur l’aspect technique.»

Des athlètes en adéquation

L’entraînement en mixité, l’essayer, c’est l’adopter, pour Christian Bauer en tout cas. En effet, il reproduit le même schéma partout où il passe, Chine, Russie, et donc France maintenant. « J’ai bien expliqué aux garçons que c’était très intéressant de tirer avec les filles. Après attention, quand tu tires contre Manon (Brunet-Apithy) ou Despina (Georgiadou), ce n’est pas gagné d’avance, parce qu’elles sont très fortes. » (NDLR : elles sont respectivement 4e et 5e mondiales).

 

Les jeunes garçons de l’effectif expérimentent beaucoup cette mixité.  « Quand je fais des compositions plus spécifiques, où je sépare garçons et filles, je mets quelquefois les jeunes garçons avec les filles pour leur montrer un peu d’autres choses. Parfois ils sont un peu vexés », sourit l’entraîneur, « mais c’est chouette. Il faut bien manager quoi, c’est ça qui est important, sinon ça peut vite partir en sucette. »

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L’escrime en couple

La méthode séduit, le coach séduit. Certains Français ont quitté l’INSEP pour le rejoindre. C’est le cas du couple Manon Apithy-Brunet et Bolade Apithy. Ils sont tous deux persuadés que Christian Bauer peut beaucoup leur apporter. 

Pour Bolade, Christian Bauer est le Zidane du sabre et la mixité tout ce qu’il y a de plus naturel : « Depuis que j’ai commencé l’escrime, j’ai toujours évolué avec des filles, ça n’a jamais été un problème. » S’entraîner avec son épouse, c’est la cerise, sur le gâteau. Il précise dans un petit sourire, « quand je tire avec elle, j’aime bien faire des choses qu’elle n’aime pas, pour l’énerver. Et après je la console ! Non, sérieusement, le travail est différent mais efficace. Ça va moins vite donc je peux travailler plus sur la technique. »

Manon Apithy-Brunet et Bolade Apithy, ensemble à la ville et sur les pistes. Photo : Bolade Apithy

Manon adorait battre les garçons quand elle était petite. C’est toujours le cas, même si c’est forcément devenu plus compliqué. « C’est sympa la mixité, ça change, mais maintenant il y a un gros écart de physique et de niveau. Quand je tire avec Bolade, c’est pour faire des exercices. Avec les jeunes en revanche on tire régulièrement. En général ça se passe bien, pour nous c’est normal, nous sommes dans la culture de la mixité. »

Maintenant installé à Orléans, le couple apprécie sa nouvelle vie et se réjouit de ne plus être séparé à l’entraînement. « On se soutient mutuellement. En cas de coup dur, l’autre n’est jamais bien loin. » 

Les Sportives Centre-Val de Loire
07.02.2024

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