À la rencontre des sportives

Alicia Dubois, le Tour de France à vélo pour se libérer du cancer

Alais Diebold
08.07.2021

Alicia Dubois, 19 ans, a déjà vaincu deux cancers. Le dernier en début d’année. Elle participe en ce moment à l’opération Donnons des elles au vélo J-1. Elle souhaite finir ce Tour de France pour mettre en avant son combat et celui de l’association Une dernière larme. Rencontre.

À 19 ans, Alicia Dubois réalise le parcours du Tour de France 24 heures avant la course officielle, au terme d’un long combat. À six ans, elle a vaincu un neuroblastome, un cancer pédiatrique qui touche le nerf sympathique. Puis, à l’hiver 2020-2021, des métastases rein-foie-poumon se sont développées. Mais sa maladie n’aura pas eu raison de sa passion pour le cyclisme, débuté à l’âge de 5 ans et plus jamais abandonné. 

« Il y a neuf mois j’avais 10 kg en moins, j’étais allongée dans un lit »

Alicia n’est en rémission que depuis avril 2021. Pourtant, elle s’entraine depuis janvier et s’est élancée fin juin sur la Grande Boucle. Avant cela, elle avait pris part aux Championnats de France. Bien que classée hors-délai, elle se réjouit de sa progression par rapport l’édition précédente. Ces meilleurs résultats, ses entraineurs les attribuent à son mental. Vaincre sa maladie en poursuivant le cyclisme malgré les traitements l’aura fait progresser. « J’ai gagné en mental », affirme-t-elle. Son second objectif sportif depuis sa rémission est de réaliser l’intégralité des étapes du Tour de France, aux côtés des ambassadrices de Donnons des Elles au Vélo. « Je me dis que c’est beau si j’arrive à vraiment le finir et bien. Il y a neuf mois j’avais 10 kg en moins, j’étais allongée dans un lit. J’étais un « légume ». Je ne pouvais rien faire, j’étais fatiguée, je toussais, je crachais mes poumons. Maintenant je suis sur un vélo. »

Désormais, elle souhaite que d’autres enfants aient la même chance qu’elle. Que d’autres puissent bénéficier de traitements adaptés à leur maladie. C’est pour cela qu’elle représente l’association Une dernière larme. Cette association, fondée par Yann Le Flem, organise une opération Je roule pour le cancer des enfants. Une lutte entamée suite au décès de sa fille Émilie, atteinte d’un sarcome d’Ewing.

Éduquer, sensibiliser

Développer la recherche, récolter des fonds pour l’hôpital Gustave Roussy et faire connaitre les cancers pédiatriques. Ce sont les objectifs que se sont fixés Alicia Dubois et Yann Le Flem, qui participent ensemble à cette Grande Boucle. Cette première participation a une fonction pédagogique. « La grande complexité du cancer des enfants c’est qu’il n’y a pas un cancer des enfants, il y en a 76 », explique le fondateur de l’association Une dernière larme. Il dénonce le fait que seulement 5 millions d’euros par an sont débloqués pour les cancers des enfants. Cela correspond à 2 % des fonds pour la recherche sur les pathologies cancéreuses. Selon lui, il faudrait 18 millions d’euros par an pour la recherche sur les cancers pédiatriques. Dès l’année prochaine, l’évènement Je roule pour le cancer des enfants se déroulera en septembre pendant le mois du cancer des enfants pour interpeller les pouvoirs publics.

Du retour du Tour de France au sport-santé

Alicia Dubois termine l’ascension du Col de la Colombière (1618 m). ©Mickael Gagne

L’exemple d’Alicia est révélateur du tournant prit par l’opération Donnons des elles au vélo. Jusqu’à présent, ce projet avait essentiellement pour objectif de promouvoir un Tour de France au féminin. À partir de 2022, ce sera chose faite ! L’épreuve féminine sera de retour. Désormais, pour les organisatrices, il s’agit de se réinventer. « On a décidé de créer des évènements en amont du Tour de France et plus seulement le J-1. Dans ces évènements, on a décidé de mettre en lumière toutes les pratiques du vélo et notamment celle dans l’axe « sport-santé », parce qu’on sait que le vélo est une discipline accessible à beaucoup de pathologies », déclare Aurore Macon, ambassadrice de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

La pratique du cyclisme comme sport-santé contribue à l’amélioration de la santé physique, psychologique et sociale des pratiquant·e·s. Le cyclisme permet le maintien de la santé (prévention primaire), peut améliorer l’état de santé d’individus souffrant de maladies chroniques (prévention secondaire) et prévenir une récidive ou une aggravation des maladies chroniques (prévention tertiaire). Une étude réalisée par l’Université de Glasgow en 2017 indique que pratiquer le cyclisme quotidiennement diminuerait de 45 % le risque de développer un cancer.

Le vélo entraine aussi des bienfaits psychologiques. « C’est aussi une manière de passer outre les traitements, de se remettre en forme après une chimio, après des rayons, de retrouver une qualité de vie. » C’est ce qui avait motivé Alicia à poursuivre le cyclisme pendant le temps qu’ont duré ses traitements. Penser à autre chose. Se vider la tête. Ce sont les termes qui reviennent dans une discussion avec des adeptes du sport-santé. Pour Alicia, le sport lui permet, en plus, de se sentir vivante. « J’ai continué le sport parce que j’avais besoin de me rassurer, de me dire que je suis malade mais que je tiens quand même le peloton, que je suis toujours là. »

Propos recueillis par Alaïs Diebold

Crédit photo : Mickael Gagne

Alais Diebold
08.07.2021

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