Agathe Bessard
À la rencontre des sportives

Agathe Bessard : « Les Jeux c’est la seule retombée médiatique pour le skeleton »

Constance Vignaud
01.02.2022

La skeletoneuse Agathe Bessard s’est vu refuser son quota individuel qu’elle avait obtenu pour partir à Pékin. Elle aurait pu être la première femme à représenter la France aux Jeux olympiques dans son sport. Mais la jeune femme de 22 ans compte prouver à sa fédération qu’elle a sa place parmi les meilleures. Rencontre.

Le skeleton, Agathe Bessard l’a commencé enfant, car son papa dirigeait l’unique piste nationale à La Plagne. Elle a tout fait depuis quelques mois pour faire parler de son petit sport, presque inconnu en France :  cagnotte en ligne, passage dans de nombreux médias. Mais cela n’aura pas suffit pour qu’elle réalise son rêve olympique. Malgré la frustration et l’incompréhension, la Plagnarde nous donne rendez-vous dans quatre ans, en Italie.

Les Sportives : Vous avez déclaré que les minimas de la Fédération française étaient trop élevés. Savez-vous pourquoi ils ont mis la barre aussi haut ?

Agathe Bessard : Je n’ai pas de raisons exactes, mais je sais qu’en ce moment la politique du sport français c’est des médailles ou rien. Donc je pense que la fédération était un peu obligée d’avoir des minimas assez hauts. J’étais au courant dès le début de saison de ce que je devais réaliser. Mais ce n’est pas forcément cohérent dans tous les sports. On voit certain·e·s athlètes, en ski de fond par exemple, qui n’ont pas fait une seule coupe du monde cet hiver et qui partent pour Pékin. C’est un sujet qui fait souvent débat, mais sur le circuit du skeleton, personne n’a compris cette décision. Ça fait du bien de se sentir soutenue, de voir que je ne suis pas seule.

« Pour le moment il n’y a qu’une piste, à La Plagne, et on est seulement trois en compétition et moins de dix licencié·e·s… »

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Le sport français fait-il les bons choix, lorsqu’on sait que certains pays remplissent leurs quotas avec des athlètes sans grande expérience, pour leur en donner ?

Je pense qu’il y a un juste milieu à trouver : qu’on n’envoie pas quelqu’un aux Jeux juste pour l’envoyer… Si c’est la fin de sa carrière, on sait qu’il n’a aucune chance plus tard. Mais par contre, si c’est un·e jeune athlète, qui a du potentiel, des chances de performer dans le futur, je ne vois pas pourquoi on le priverait d’une première expérience olympique. 

Agathe Bessard

Agathe Bessard – @IBSF

En skeleton, êtes-vous la seule dans ce cas-là ?

Mon quota a été donné à la Suède qui a également refusé le quota. On est donc deux à avoir vu notre quota refusé pour la même raison.

Les sports de glisse sur glace sont peu développés en France. Pensez-vous qu’une participation aux Jeux pourrait donner envie à des jeunes de se lancer dans ces sports à sensation ?

Les Jeux, c’est la seule vraie retombée médiatique pour le skeleton. C’est une grande aide pour tous les sports. Donc forcément, si le skeleton passe à la télé et qu’il y a une représentante française, ça peut donner des idées. Que les gens puissent se dire : « Il y a des clubs, je peux peut-être essayer de les contacter. » Pour le moment, il n’y a qu’une piste, à La Plagne, et on est seulement trois en compétition et moins de dix licencié·e·s…

 

« Je n’ai jamais caché à personne que je n’étais pas du tout médaillable à Pékin. »

Vous avez été bronzée à Lillehammer lors des JOJ 2016. Que vous a apporté cette expérience pour la suite ?

C’était mon premier podium, donc forcément ça reste un de mes plus beaux souvenirs de carrière. Et c’était un peu la découverte de ce que sont les Jeux, même si tout est extrêmement réduit. C’était vraiment une super expérience. 

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Vous avez déjà participé à deux championnats du monde. Pensez-vous que vous auriez eu votre place à Pékin ?

Je n’ai jamais caché à personne que je n’étais pas du tout médaillable à Pékin. Il n’y avait aucun doute là-dessus. Après, je serais partie avec mon entraîneur, qui n’avait pas pu être présent sur le test event en octobre, et on aurait forcément fait un travail plus qualitatif. On aurait pu faire un beau résultat même sans jouer le podium, peut-être une 15e place.

Qu’allez-vous faire pour vous remettre en marche ? Quels sont vos prochains objectifs à court et long terme ?

Maintenant, je ne fais plus grand chose. Je suis rentrée à La Plagne. D’abord, c’est du repos. Ensuite, quand j’aurai la tête à retourner à l’entraînement j’y retournerai, mais uniquement pour faire des descentes plaisir. Sans pression, sans rien. Cette année c’était ma dernière année junior. La suite sera de continuer la progression qu’on a entamée cette saison et de mettre en place tout ce qu’il faut pour que dans 4 ans on soit performant·e·s. Mais il faut voir si la fédération souhaite s’engager avec moi. Je veux repartir sur une vraie olympiade avec un projet, j’espère très solide, qui peut nous amener à faire un gros résultat aux prochains Jeux. Sinon, il faudra que je me pose des questions. 

« Ça m’a servi à couvrir les frais de ma saison et à faire découvrir mon sport et mon parcours. »

Après cette énorme désillusion, qu’attendez vous de votre fédération ? 

J’attends une aide. La saison financière que j’ai faite, je ne peux pas la refaire. Une saison entière à ma charge ce n’est pas possible. J’attends d’elle de voir ce qui est possible de mettre en place pour avoir un soutien financier, notamment un entraîneur que je n’aurais pas besoin de payer moi-même.

Vous vous attendiez à autant de participation pour votre cagnotte ?

Au début, je ne savais pas trop où on allait, si ça allait marcher ou pas. Et quand on a vu l’ampleur qu’elle prenait, ça a vraiment été une grande surprise. C’était vraiment bien, ça a servi à couvrir les frais de ma saison et à faire découvrir mon sport et mon parcours. J’ai de plus en plus de personnes qui me suivent, ça fait plaisir. Et tous les messages de soutien que j’ai reçu après ma non-sélection, ça fait chaud au cœur. Même si je suis déçue que toutes celles et ceux qui ont participé restent sur leur faim.

Propos recueillis par Constance Vignaud

Crédits photo : ISBF

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Constance Vignaud
01.02.2022

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